Sensibilisations aux médias
Publié le 05.07.2024
La majorité numérique à 15 ans : zoom sur la loi
Parents, vous connaissiez déjà la majorité civile et la majorité sexuelle. Désormais, il faut aussi prendre en compte la majorité numérique. À quoi renvoie ce concept ? Que prévoit la loi sur l'âge pour s'inscrire sur les réseaux sociaux ? La MAE fait le point sur le cadre légal de la majorité numérique, et la manière dont cette règle entend protéger les enfants des menaces d'Internet.
Qu'est-ce que la majorité numérique ?
2023 marque une avancée majeure pour la protection des enfants contre les dangers du Web ! Votée quasiment à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée nationale, la proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne a également été examinée par le Sénat puis définitivement adoptée. La loi du 7 juillet 2023 a ainsi été publiée au Journal officiel le 8 juillet de la même année.
Qu'entend-on par majorité numérique ?
Ce terme désigne l'âge à partir duquel on estime qu'un individu a le contrôle de sa propre image et de ses informations personnelles. Et qu'il est ainsi en mesure de pleinement consentir à leur utilisation par des services en ligne, sans avoir à solliciter l'autorisation de ses parents. Dans le cadre de la loi récemment promulguée, la majorité numérique définit l'âge légal minimum que doit avoir un enfant pour s'inscrire seul sur les réseaux sociaux. À savoir, 15 ans.
Une loi pour protéger les mineurs des réseaux sociaux
Les enfants s'inscrivent pour la 1re fois sur un réseau social à l'âge de 8 ans et demi
En tant que parent, vous vous demandez peut-être pourquoi cette loi a été mise en place. L'objectif est de construire un Internet plus sûr pour les jeunes enfants, qui sont massivement connectés, avec des inscriptions de plus en plus précoces sur les plateformes de social media.
Pour preuve, les chiffres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) partagés par le site vie-publique.fr : en moyenne, le premier enregistrement sur un réseau social surviendrait autour des 8 ans et demi. Plus de 50 % des adolescents de 10 à 14 ans auraient déjà créé leur profil !
Une autre enquête de l'association Génération numérique, relayée par le gouvernement, révèle que 63 % des mineurs de moins de 13 ans détiennent au moins un compte sur un réseau social. Pourtant, l'accès aux plateformes telles que TikTok ou Instagram est interdit aux enfants n'ayant pas encore soufflé leurs 13 bougies.
Un cadre légal plus strict pour lutter contre l'exposition aux contenus inappropriés
La loi sur la majorité numérique vise donc à repousser l'âge légal à partir duquel les enfants peuvent, en toute autonomie, ouvrir un compte sur Snapchat, YouTube, Twitter, etc. Malheureusement, les réseaux sociaux sont régulièrement le théâtre de cyberviolences. Intimidations, insultes, moqueries, humiliations, voire menaces et cyberharcèlement. Autres conséquences de la présence des jeunes sur les réseaux sociaux ? L'exposition à la pornographie, l'addiction aux écrans, les risques de désinformation ou encore les problèmes de sommeil.
Bon à savoir : à son échelle, la MAE s'efforce, elle aussi, de protéger les enfants face aux dangers numériques. Sachez que si vous avez souscrit à une assurance extrascolaire MAE pour votre enfant, il peut bénéficier d'un soutien psychologique suite à une situation de cyberharcèlement, de vol ou de racket.
Enfin, à partir de la rentrée 2024/2025, la Protection Individuelle 24/24+ proposera, en plus des garanties déjà existantes, l'accès à un conseil nutrition santé, la suppression des contenus malveillants liés à son image sur le web et un accompagnement au déménagement en cas de besoin.
Quels sont les bénéfices attendus suite à l'entrée en vigueur de la loi du 7 juillet 2023 ?
Face à ces enjeux d'envergure, l'importance de légiférer sur la présence des mineurs sur le Web devient évidente. Concrètement, plusieurs résultats sont escomptés avec l'application de la loi sur la majorité numérique.
Des mesures d'accès aux réseaux sociaux renforcées
C'est le cœur de la loi : mettre davantage de barrières en place pour reculer l'âge d'inscription des enfants sur les réseaux sociaux, via une interdiction officielle. Les géants du Web qui exercent sur le territoire français sont donc appelés à déployer un système pour contrôler les demandes de création de comptes de la part des mineurs de moins de 15 ans. Il ne s'agit plus d'une simple requête, mais bel et bien d'une obligation.
Une meilleure prévention du cyberharcèlement
Autre mesure imposée par la loi sur la majorité numérique : la diffusion obligatoire de messages de prévention contre le cyberharcèlement sur les plateformes. Celles-ci devront également communiquer le numéro vert 3018, gratuit et anonyme, destiné à alerter sur les situations de harcèlement scolaire ou en ligne.
Les réseaux sociaux doivent aussi élargir les possibilités de signalement de contenus illicites par les utilisateurs en vue de leur retrait. Cela inclut désormais :
- Le harcèlement conjugal ou moral,
- Le chantage à la webcam et les sextorsions,
- L'atteinte à la représentation de la personne telle que le deepfake ou le deepvoice,
- L'atteinte à la vie privée, comme la diffusion d'informations intimes ou personnelles ou le cyber-outing (révélation publique de l'orientation sexuelle d'un individu sans son consentement).
Auparavant, les usagers pouvaient déjà dénoncer les contenus de harcèlement sexuel ou scolaire, d'incitation à la haine et d'apologie d'actes terroristes.
Une poursuite facilitée des délits en ligne
La législation prévoit dorénavant des dispositions pour poursuivre plus efficacement et sévèrement les infractions sur Internet. En effet, lors d'une enquête pénale, les plateformes en ligne sont tenues de se conformer aux réquisitions judiciaires concernant les contenus digitaux dans un délai de dix jours.
Ce temps est réduit pour les situations d'urgence présentant « un risque d'atteinte grave aux personnes », précise le texte de loi. Dans ce cas de figure, les entreprises disposent de huit heures maximum pour fournir les textes, photos ou vidéos exigés.
Ces délais sont établis également par le règlement européen relatif aux preuves électroniques du 12 juillet 2023, dit règlement e-evidence.
Des données sur la santé des enfants surexposés à Internet
Enfin, l'article 6 de la loi sur la majorité numérique indique que le gouvernement s'engage à délivrer un rapport quant à l'impact de l'usage des réseaux sociaux sur les enfants. Les travaux devront présenter « les conséquences de l'utilisation des plateformes en ligne, de la surinformation et de l'exposition aux fausses informations sur la santé physique et mentale des jeunes, notamment des mineurs, ainsi que sur leurs capacités d'apprentissage ». L'étude doit être remise d'ici le 7 juillet 2024.
Quelles sont les implications légales de la majorité numérique ?
À qui s'adresse la loi ?
La loi s'adresse aux mineurs de moins de 15 ans qui souhaitent s'inscrire sur un réseau social, ou déjà titulaires d'un compte sur une plateforme. Sont donc concernées les sociétés qui proposent un service de réseau social en France. La définition juridique des réseaux sociaux est établie par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Est un réseau social « toute plateforme permettant aux utilisateurs finaux de se connecter et de communiquer entre eux, de partager des contenus et de découvrir d'autres utilisateurs et d'autres contenus, sur plusieurs appareils, en particulier au moyen de conversations en ligne, de publications, de vidéos et de recommandations ».
Précision utile : les mesures sur la majorité numérique ne s'appliquent pas aux répertoires éducatifs et scientifiques à but non lucratif, ni aux encyclopédies en ligne comme Wikipédia.
Pourquoi le choix d'un seuil à 15 ans pour la majorité numérique ?
Comme l'évoque la députée Christine Loir dans son rapport d'information, « l'enfant, en tant qu'être en construction, est par essence vulnérable ». Dès lors, il convient de l'accompagner dans son développement et de le protéger. La sensibilisation aux médias, notamment, est indispensable.
Mais pourquoi 15 ans spécifiquement ? Cet âge coïncide avec celui figurant dans la loi Informatique et Libertés. Il correspond aussi à l'âge de la majorité sexuelle, et marque le passage du collège au lycée.
La majorité numérique en pratique : guide pour les parents
Quel âge pour quel réseau social ?
Pour pouvoir ouvrir un compte à son nom sur une plateforme de social media sans autorisation parentale, votre enfant doit avoir fêté son 15e anniversaire. Et ce, peu importe qu'il s'agisse de TikTok, de Snapchat ou d'Instagram ! La majorité numérique concerne l'ensemble des réseaux sociaux.
Quelles sont les conditions nécessaires pour se créer un compte sur un réseau social quand on est âgé de moins de 15 ans ?
Malgré la loi sur la majorité numérique, il reste possible pour un mineur de moins de 15 ans de s'inscrire sur un réseau social. Néanmoins, l'un des deux parents doit impérativement donner son accord au moment de l'inscription de son enfant.
Quid des jeunes déjà titulaires d'un compte ? Les plateformes disposent de deux ans pour obtenir l'autorisation des parents dont les enfants de moins de 15 ans ont un profil en ligne. Par ailleurs, sachez que vous avez désormais la possibilité de demander la suspension du compte de votre ado auprès de l'entreprise concernée.
Comment les plateformes vont-elles faire respecter cette limite d'âge ?
La législation impose aux réseaux sociaux la mise en œuvre d'une solution technique pour vérifier l'âge de leurs utilisateurs et recueillir l'autorisation parentale. Ce dispositif doit respecter des normes spécifiques élaborées à cet effet.
Quoi qu'il en soit, les plateformes doivent obligatoirement activer une fonctionnalité de contrôle du temps passé en ligne pour chaque inscription de mineur. Des notifications régulières permettront d'informer l'enfant sur son utilisation du réseau social.
FAQ
Quelles sont les conséquences pour les plateformes qui ne respectent pas la majorité numérique ? Le non-respect des obligations relatives à la majorité numérique peut entraîner des amendes au montant potentiellement très élevé. Par exemple, un réseau social ne mettant pas en place la solution technique de vérification de l'âge obligatoire encourt une amende pouvant atteindre 1 % de son chiffre d'affaires mondial.
Les parents ont-ils un rôle dans l'application de la majorité numérique ?
Les titulaires de l'autorité parentale ont pour mission d'accompagner leurs enfants dans l'utilisation responsable et sécurisée d'Internet, et de les encourager à se conformer aux règles en vigueur.
La majorité numérique est-elle la même dans tous les pays ?
Pas nécessairement. En effet, le règlement général sur la protection des données (RGPD) autorise chaque pays européen à fixer lui-même sa propre majorité numérique. Toutefois, celle-ci doit être comprise entre 13 et 16 ans, comme l'indique le Centre européen des consommateurs France.